Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
L'amour de la Mauritanie
30 octobre 2007

Les berberes s'affirment

Qui sont les Berbères ?

Depuis plusieurs millénaires, ils constituent le fond de la population de l'Afrique du Nord. Des îles Canaries jusqu'à l'oasis de Siwa (Egypte), des côtes algériennes jusqu'aux massifs du Hoggar (Algérie) et de l'Aïr (Niger), dans toute cette immense région, de nombreuses tribus berbères étaient installées, lointaines parentes des anciens Egyptiens et des peuples sémitiques. Sédentaires ou nomades, ces tribus vivaient dans la plus parfaite et anarchique démocratie tribale.
A la mort de Mahomet, au VIIe s., l'expansionnisme arabe amena la désagrégation de l'homogénéité ethnique et linguistique de la Berbérie jusqu'alors peu modifiée par les diverses invasions qu'elle avait subies. La première invasion arabe bouleversa profondément les Berbères en leur apportant l'Islam qui devait les unifier au nom de la communauté des croyants, l'oumma. Déjà partiellement judaïsés et christianisés, les Berbères embrassèrent la nouvelle foi.
Ce fut un processus étalé dans le temps parce que leur résistance aux envahisseurs fut énergique. Mais peu à peu, au fur et à mesure que tombaient les chefs les plus courageux et charismatiques tels que Damia, la fameuse Kahena, reine juive des Aurès, l'arabisation s'accentuait dans les villes et le long des grands axes de communication. A peine islamisés, de nombreux guerriers berbères suivant leurs nouveaux chefs arabes, partaient à la conquête de la péninsule ibérique. Au VIIIe s., les Berbères adhérèrent massivement au schisme kharijite manifestant par là leur particularisme national ainsi que leur opposition politique au califat. Leurs descendants, tous berbérophones, subsistent encore au Mzab, à Ouargla, sur l'île de Djerba et dans le Djebel Nefousa libyen.
Aux siècles suivants, deux dynasties berbères originaires de la Mauritanie, les Almoravides, et du Maroc, les Almohades, fondèrent les plus grands empires de l'Afrique du Nord. Au XIIe s., une nouvelle vague d'envahisseurs arabes, les Beni Hilal, détruisit ce qu'il restait de la splendeur de cette période. Un siècle plus tard, les régions complètement arabisées s'étaient étendues presque jusqu'à leur actuelle extension. C'est seulement depuis lors que l'on peut parler d'une dualité ethnique du Maghreb : ainsi, à côté des Berbères, il y a également des Arabes autochtones. Le cadre ethnolinguistique s'est définitivement stabilisé au XVe s. après l'arrivée des Beni Maqil qui colonisèrent la Mauritanie et assimilèrent les tribus autochtones; le massacre et l'absorption des Guanches par les Espagnols au XVIe s. paracheva les changements intervenus en Berbérie. La berbérité se maintînt jusqu'à nos jours dans les zones de refuge, les montagnes et le désert.
Sont actuellement berbérophones : depuis l'oasis de Siwa, à l'est, plusieurs oasis du centre de la Libye ainsi que les régions confinant avec la Tunisie et l'Algérie; Djerba et quelques villages du sud tunisien; une grande partie du Sahara algérien, l'Aurès, les Kabylies, l'Ouarsenis, les monts de Tlemcen; les deux tiers montagneux du Maroc; le Trarza mauritanien; et enfin, l'essentiel des montagnes arides et hostiles du Mali et du Niger. Sur ce territoire immense, vingt millions de personnes maintiennent vivant l'usage des différents parlers berbères. Mais il faut leur ajouter plusieurs autres millions qui habitent les régions récemment arabisées, sans compter les nombreux émigrés qui font de Casablanca, Alger et Paris, les plus grandes villes berbères.
Situation politique et culturelle
Laissons de côté les Berbères d'Egypte (deux ou trois milliers) sur lesquels nous manquons d'information. Négligeons ceux de Libye (250 000) oubliés de tous alors même qu'ils semblaient montrer des velléités d'opposition au régime du colonel Kadhafi, grand défenseur des peuples colonisés par les autres. Les Berbères tunisiens (300 000) ne font de tort à personne et sont surtout connus pour leur hospitalité, la beauté de leurs villages fortifiés, les ksours, et le charme de Djerba; beaucoup ont émigré en France où ils sont épiciers comme les Soussis du Sud marocain et les Mozabites.

Mauritanie

Mauritanie. Depuis le renversement du président Ould Daddah en 1977, les tribus maraboutiques (et berbères) de Mauritanie jouent un rôle plutôt effacé dans la conduite du pays. Associés aux Arabes dans la société de caste maure, les 200 000 Zénagas disputent aux peuples négro-africains, le pouvoir et les maigres ressources économiques d'un pays ruiné par des décennies de sécheresse et de rivalités entre tribus pro et anti- saharouies.

Niger et Mali.

Depuis 1990, l'insurrection des Touaregs du Niger (500 000) et du Mali (300 000) occupe les médias. Les anciens seigneurs des Noirs de la boucle du Niger, dont les femmes vont sans voile et sont les gardiennes du vieil alphabet tifinagh, se sont retrouvés citoyens de seconde catégorie dans les États nés de la décolonisation. Complètement marginalisés aussi bien au Mali qu'au Niger, ils ont vu leur antique économie de transhumance se désagréger sous les effets conjugués de la sécheresse et de l'apparition de frontières Étatiques là où leur liberté de mouvement était totale. Elevé au rang de langue nationale au Niger, le tamacheq est enseigné et utilisé dans les médias. Dans ces deux pays sahéliens, on s'achemine vers l'autonomie politique et culturelle des régions touarègues alors que la situation de ce peuple en Algérie (20 000) comme en Libye (50 000) reste déplorable.

Maroc.

L'existence d'un mouvement berbériste dans le Maroc actuel est bien connue. Sa volonté de voir introduite la langue tamazight dans les usages officiels est largement justifiée par le fait que les dialectes berbères sont utilisés par dix des 25 millions d'habitants que compte ce pays. Face à cette demande, la monarchie répond par la répression policière comme par exemple, au printemps dernier.
Il peut paraître étrange que le seul État arabe héritier des empires almoravide et almohade refuse d'accepter cette revendication. Cela paraît encore plus étrange lorsque l'on sait qu'Hassan II a épousé une Berbère et qu'il utilise volontiers cette langue pour traiter avec les tribus de l'Atlas dont l'allégeance lui assure une bonne partie de son pouvoir. Cependant, il ne faut pas oublier que pour d'évidentes raisons intérieures et géopolitiques, le souverain ne peut se permettre de réduire l'arabité de son État en reconnaissant la dualité ethnique de la population marocaine. Il faut également rappeler que la tentative malheureuse de l'administration coloniale française sous le maréchal Lyautey de jouer sur l'opposition culturelle entre Arabes et Berbères afin de mieux les contrôler, a laissé des traces dans tous les milieux politiques marocains qui se méfient de toute affirmation berbériste. Il convient encore d'ajouter que la revendication berbère est essentiellement le fait des populations de l'Atlas, le bled-es-siba, le “pays de la dissidence” qui depuis de nombreux siècles s'oppose au bled-el-maghzen, le “pays soumis” aussi bien berbère qu'arabe. Si elle n'est pas encore admise dans les écoles, la langue tamazight est largement utilisée sur les trois grandes radios qui couvrent la montagne berbérophone.

Publicité
Publicité
Commentaires
L'amour de la Mauritanie
Publicité
Publicité